Ce devait avoir lieu en avril, ce sera finalement en septembre.
Ce devait être un week-end de courses d’arête, ce seront deux jours de grandes voies montagne.
Ce que nous aurons surtout appris ces 17 et 18 septembre, c’est que la pratique de la montagne est une constante adaptation ! Et lorsque Raphaële notre guide nous enjoint de prendre les décisions qui s’imposent, de choisir nos courses, nos itinéraires et donc de jouer notre rôle de premières de cordée, là, à 6, les choses se corsent !
Tout d’abord, il faut s’adapter aux conditions météorologiques. Celles des 23 et 24 avril étaient mauvaises ; la pluie et les orages annoncés pour ce qui devait être deux jours d’alpi/rocher… Aussi avons-nous dû, deux jours avant, nous résoudre à renoncer.
C’est donc ce week-end de septembre que nous nous retrouvons. Rendez-vous est donné samedi matin à 8h30 à Guillestre. Nous serons 6 plus Raphaële, avec, enfin, le retour de blessure d’Heather qui nous manquait depuis plusieurs mois !
La météo, là encore, nous contraint à envisager des changements de plans. Ce qui est prévu, c’est le Queyras avec une grande voie rocheuse équipée ou semi-équipée au Rouchon (2927m) le samedi, puis l’ascension du Bric Bouchet (2998m) en terrain d’aventure, le dimanche.
Mais il fait froid ce samedi, et le vent souffle. Sur le parking, le soleil brille mais des rafales à 80 km/h sont annoncées. Raph nous prévient, être sur une arête par grand vent, c’est dangereux. Prendre la direction du Rouchon aujourd’hui, c’est risquer de devoir faire demi-tour en arrivant au pied… Elle évoque des plans B, mais nous laisse discuter et décider.
Nous avons un peu de temps, car autre adaptation nécessaire ce matin, l’adaptation aux impondérables ! Et oui, pas de chance pour Heather, pneu crevé… Lorsqu’elle arrive finalement avec plus d’une heure de retard, nous ne sommes toujours pas décidées !

Elle rentre donc dans la discussion, mais prendre une décision à 6 est compliqué ! Certaines ont déjà fait les courses des plans B et C, on en revient donc au plan A, mais celui-ci a plusieurs itinéraires d’approche possibles… bref, on saura pour les prochaines fois et pour notre futur projet de fin de formation qu’il sera plus efficace de déléguer un rôle à chacune, notamment celui du choix de l’itinéraire !



Enfin, après une belle marche d’approche depuis le col Agnel, dans un paysage digne des steppes d’altitude, nous arrivons au pied du Rouchon, il est 13h… c’est tard pour attaquer une voie, mais nous avons enfin un peu de chance, l’orientation de la face nous protège du vent, et le froid est du coup tout à fait supportable. Les trois cordées partent dans la même voie, nous devons toutes nous retrouver après quelques longueurs pour bifurquer sur la voie normale et finir l’ascension en corde tendue. La voie est équipée mais nous essayons le plus possible de poser nos propres protections que Raph ne manque pas de tester dès qu’elle le peut. A quelques encablures du sommet, Gwen, emportée par son élan et son envie, finira la dernière longueur, la plus engagée. La vue du sommet est magnifique, les sommets du Queyras, le Bric Bouchet, la tête des Toillies, la Taillante, le Viso, tant de courses que nous envisageons pour plus tard ! Nous redescendons toutes par la voie normale et travaillons l’évolution en corde tendue, et en sécurité. Nous retrouvons Sylvie, notre camerawoman, qui nous a suivies et filmées depuis les alpages au pied de la face.




A départ tardif retour tardif ! Il est 18h lorsque nous arrivons aux voitures. Il est prévu que nous retrouvions Angèle pour discuter du voyage de fin de formation. Mais nous ne savons pas ce que nous faisons le lendemain, et donc où nous bivouaquerons cette nuit…
Alors direction l’auberge d’Aiguilles, on discutera mieux devant une bière ou une boisson chaude ! Nous évoquons les enseignements de la journée, la difficulté des prises de décision lorsque l’on est beaucoup. Nous évoquons le programme du lendemain, et là, c’est à un nouveau facteur que nous devons nous adapter : le facteur humain.
Faire le Bric Bouchet à trois cordées, même si l’évolution est prévue en corde tendue dans un terrain relativement facile, c’est une longue course. Il faudrait se lever tôt pour un départ vers 6h ou 6h30… Heather, qui n’est pas totalement remise de sa blessure au mollet, et malgré une volonté de fer, a souffert aujourd’hui. Nous devons en tenir compte si l’on veut qu’elle soit des nôtres le lendemain. D’autres sont fatiguées, redoutent la nuit froide en bivouac, le départ très matinal, la longueur de la course… et préfèrent donc une course plus courte, moins engagée, où nous pourrions continuer d’apprendre la montagne.
Nouvelle adaptation ! Il faut changer de plan ! Regarder les topos du coin, trouver une course qui ne soit pas loin, où le bivouac est possible, discuter encore, se mettre d’accord… Mais on y arrive !!!
Le choix se porte sur la crête de Balari et “micro-calcifications”, une grande voie de 5 longueurs équipées, en 5c max.
Nous arrivons au parking du Queyron vers 22h, il fait nuit et froid, les tentes sont vite montées et les fourgons garés. La soupe de Pauline est une vraie bénédiction ! Elle réchauffe les corps et les cœurs, et avec les étoiles qui brillent, ce moment de partage et de convivialité est unique ; ce sont des filles frigorifiées mais heureuses qui se couchent avec le sourire.


Le réveil nous offre une belle surprise, le vent est tombé et le ciel est parfait ! Le soleil s’invite même au petit déjeuner, c’est de bonne augure pour la journée.


Après 45 minutes de marche d’approche à vue dans les alpages, nous arrivons au pied de la face et cherchons quelques minutes le départ de l’unique voie. Merci les topos avec photos qui facilitent grandement le repérage !
Raphaële nous rappelle les fondamentaux de l’évolution en corde tendue, répond au fur et à mesure aux questions des unes et des autres, insiste toujours et encore sur les techniques de sécurité.

Les trois cordées sont formées, nous entamons la première longueur, charge aux premières de chaque cordée de guider l’évolution en fonction du terrain qu’elles découvrent. Puis la grimpe se fait plus technique et nous passons en mode équipé. Après 5 longueurs nous nous retrouvons au sommet, Heather a déroulé une banderole “happy birthday” pour l’anniversaire de Gwen, la vue est magnifique, le ciel est limpide, tout est parfait !



La descente commence par un court rappel de 15 mètres, puis continue à pied en suivant une jolie petite crête et une sente qui nous ramène à l’alpage de départ. Raph nous montre encore quelques manip de sécurisation des descentes, d’assurage à l’épaule et étoffe ainsi notre bagage de montagnardes !
De retour au parking vers 17h, nous faisons le bilan de la journée. Et avant de nous quitter, Raphaële nous incitera à le faire ce fameux Bric Bouchet, et en autonomie cette fois, comme des grandes que nous devenons à chaque sortie ! D’autant qu’avec ces deux jours, c’est la première année de notre formation qui se termine… Rendez-vous fin octobre pour de nouvelles aventures !